Psychiatrie/psychologie et justice

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18 ans ou plus

Psychiatrie/psychologie et justice 12 08/10/14 à 20:50

Bonsoir,

Je lance un petit débat "philosophique" sur une question relative à la psychiatrie et/ou la psychologie, ainsi que la justice dans notre société.

Imaginez un homme ou une femme souffrant de troubles psychiatriques : là, c'est nettement trop vaste. Sans prendre des cas où le trouble est aisément définissable, comme la schizophrénie, la bipolarité et autres, juste une personnalité clairement psychotique ou même névrotique, qu'elle soit innée ou acquise face à x ou y évènements vécus (éducation discutable, traumatismes ou autres) ou les deux. Ou alors même une personne qui ne souffre pas de troubles particuliers.

Imaginez que cette personne commette un crime ; un viol, un meurtre, etc etc. Devant la justice, elle n'est irresponsable pénalement que si les experts psychiatriques décèlent un trouble clair et répertorié comme ceux cités en haut. Mais dans les autres cas, qui peuvent découler d'influences multiples voire infinies dans la vie de cette personne, elle est jugée comme toute autre.

Alors selon vous, cette personne est-elle "responsable" au sens premier du terme ? Peut-on réellement blâmer, en vouloir à une personne pour le chemin de vie qui l'a menée à un certain acte, lui en vouloir pour ce qu'elle est - parce que nos actes découlent tous de ce que l'on est profondément ? Que le coupable ait été mené à son crime - aussi horrible soit-il - par des troubles clairement psychiatriques, ou qu'il ait simplement commis un acte dans certaines conditions, dans un certain contexte, un cadre de vie, un état moral, etc, peut-on le considérer comme responsable et le condamner à une vie plus ou moins misérable en cellule de prison ?

Merci et bonne soirée !

Psychiatrie/psychologie et justice 1/12 08/10/2014 à 21:05
Bon alors j'avoue que j'ai pas tout saisi parce que tout me parait confus, mais une personne n'est absolument pas déclarée irresponsable pénalement parce qu'elle a un trouble psychiatrique avéré, elle l'est si au moment du crime son jugement était altéré par un quelconque trouble.

En gros y a des schizophrènes par exemple qui sont sous traitement et qui ont des périodes où ils sont tout à fait conscients de ce qu'ils font, dans ce cas là techniquement la personne doit être jugée.

Après si on parle de sujet névrotico-normal, ça me parait évident que le contexte du crime doit être pris en compte, ça ne veut pas dire qu'il ne doit pas être jugé.

J'ai un patient justement qui en entretien racontait que pour lui un sujet atteint de trouble psychiatrique devait pouvoir être également accessible à la justice, parce que déclarer qu'une personne ne pouvait pas être jugée à cause de sa maladie c'était une forme de déshumanisation justement, que le fou perdait son statut de personne en quelque sorte.

Quoiqu'il en soit c'est le jeu, quand y a un crime il y a un jugement. Evidemment qu'un crime arrive souvent dans un contexte très particulier, que même un sujet névrosé n'en arrive pas à commettre des crimes sans aucune raison, mais je vois difficilement comment on pourrait justifier le fait que le contexte excuse.
Sora   
Psychiatrie/psychologie et justice 2/12 08/10/2014 à 21:31
C'est un peu plu compliqué que ça... Mais c'est pas pris à la légère, y'a beaucoup plus de facteurs pris en compte que la seule pathologie
Psychiatrie/psychologie et justice 3/12 08/10/2014 à 22:00
Pour l'irresponsabilité pénale relativement à l'abolition du discernement au moment de l'acte, particulièrement pour la décompensation schizophrène je te donne entièrement raison Dazzlious, j'ai pas été assez précise.

Intéressant cette déshumanisation du "fou" quand il y a absence du jugement, j'avais un vague sentiment lié à ça mais je n'aurai pas réussi à le mettre en mots, merci Smile

Et en effet, dans un jugement le maximum d'éléments sont pris en compte, mais j'essaie - avec peine, c'est confus oui ^^ - de poser la question du "a-t-on le "droit" d'attribuer une peine à un homme mené à ses actes par x ou y contexte voire troubles psychiatriques".
En bref, pour moi la prison ne me semble pas être une solution adaptée, induisant trop la diabolisation des "méchants derrière les barreaux", le concept même de punition, alors qu'au fond je crois très peu en une quelconque sorte de reconversion pour les criminels emprisonnés.
Tout le concept d'acte criminel étant lié à des éléments indépendants de la volonté du criminel en question, une forme de "nouvelle" structure n'est-elle pas nécessaire ? Une sorte de structure qui permettrait l'isolement - pour la sécurité de la société - mais également un avenir, une possibilité de mieux-être pour les criminels ; l'hôpital psychiatrique ne me semble pas être une solution pour tous les cas.

Ce qui me dérange dans le principe des condamnations, c'est le concept de cette "punition" en partie injustifiée et en grande partie inutile, n'induisant que des réactions dz type "je ne vais plus le faire parce que je crains la punition, mais j'en ai toujours envie au fond, et j'en souffre toujours".

C'est plus clair ou c'est encore plus confus qu'avant Mr. Green ?
Psychiatrie/psychologie et justice 4/12 08/10/2014 à 22:12
Non c'est bon, je comprends mieux.

En fait tout dépend de ce qu'on attend de la justice. Personnellement je pense un peu comme toi, que foutre quelqu'un en taule c'est pas une solution. Mais ce qui me gène c'est pas tant le fait que la personne soit condamnée (parce que je pense qu'une condamnation doit être prononcée), mais plutôt les conditions de détention.

A l'heure actuelle les conditions de vie ne prison font que si t'es pas fou en y entrant, tu l'es en ressortant, sont t'es qu'un petit délinquant y a pas grand chose pour t'aider à te sortir de ça... Enfin bref, mettre quelqu'un à l'écart de la société dans des conditions minables, c'est le meilleur moyen qu'il en ressorte avec la volonté de ne se réintégrer dans la société justement.

En fait ce qui est super intéressant ce sont les systèmes de détention qu'on retrouve dans les pays du nord. Si on veut que les personnes qu'on met en prison se comportent comme des humains, il faut les traiter comme des humains, ça me parait essentiel.

Après y a toujours des gens pour dire que de toute façon ces gens là sont des connards et que la prison c'est pas le club med, c'est pas ce que je pense. La condamnation pas la justice, la mise à l'écart de la société et la privation du droit d'aller et venir, c'est déjà une peine en soi.

Donc condamnation oui, détention aussi, mais dans des conditions décentes avec un vrai travail pour préparer la réinsertion, et surtout un suivi pour ceux qui le souhaitent. Actuellement pour qu'un prisonnier puisse voir un psy en prison il doit faire une demande justifiée qui doit être approuvée par le psychiatre. Bon bah dans un monde meilleur n'importe qui pourrait aller voir un psy, on va pas décourager les gens s'ils ont envie d'élaborer, au contraire.

Mais bref, vaste débat.
Psychiatrie/psychologie et justice 5/12 08/10/2014 à 22:32
Pour moi t'as beau être bipolaire ou tout ce que tu veux, ça change rien au fait que tu dois payer pour ce que tu as fait. Et soigner également
Sinon bah c'est les laisser massacrer tout le monde... Ok la prison changera rien à leur comportement car c'est pas voulu, c'est "pas de leur faute". Mais n'empêche que si tu les laisses en liberté, bah ils peuvent commettre des tas de crimes à répétition.

Y'a eu une affaire comme ça dans le pas de calais, qu'on nomme l'affaire des fréres jourdains, j'sais pas si vous connaissez. En gros c'est deux fréres dont un qui a un handicap mental léger. Ils ont vécu toute leur vie dans une masure dans un terrain vague, ils ont pas connu leur mére... Fin bon, niveau environnement où ils ont grandit, on peut pas faire pire. Ils ont étaient condamné plusieurs fois pour viol ou pour meurtre et en ce moment ils sont en prison parce qu'ils ont enlevés 4 filles au carnaval, ils en ont violé 3, ensuite ils les ont tué sauvagement et ils ont fini par les enterré sur une plage, dont une encore vivante... Donc on peut dire que leur comportement est lié à ça, et qu'ils ne sont pas vraiment responsables. Mais bon, pour moi ils pourraient avoir tous les troubles psychiatriques possibles, ça changerait strictement rien. Quand on en arrive à une telle violence et qu'on récidive à peine sorti de prison y'a du soucis à se faire...
Je préférerais les avoir enfermé jusqu'à leur mort plutôt qu'ils sortent, parce qu'ils recommenceront.
Alors on peut se dire que ce sont des personnes malades qui ont besoin d'être soigné, que la prison ça doit être difficile à vivre pour eux et que c'est pas juste parce qu'ils sont pas responsables de leur vie... bah ça change rien, pour le bien des autres on peut pas les laisser en liberté.

On pourrait à la rigueur les mettre en hôpital psy aprés leur peine de prison mais les places se font rares et faudrait réussir à trouver le traitement adapté avant qu'ils recommencent. Et trouver un traitement, ça se fait pas du jour au lendemain.


Enfin bon en dehors de cette affaire, je pense pareil un peu pour tous les crimes. J'ai envie de dire personne ne tue quelqu'un sans raison particuliére. Mis à part les histoires de vengeance comme les réglements de compte etc... Un mec qui croise une personne dans la forêt et qui la massacre sans même la connaître, ça lui vient pas parce qu'il a envie d'essayer. Y'a forcément un trouble quelque part, un truc qui a cloché dans son développement...
Même pour une histoire de drogues d'ailleurs, c'pas parce que t'es dealeur que t'es un meurtrier. Y'a quelque chose qui a fait que tu es devenu violent.
Et c'est pareil pour les viols, tu viol pas juste pour le plaisir d'essayer.

Edit : aprés pour parler des prisons, ouai le soucis c'est pas que la justice n'est pas assez sévére, c'est surtout qu'elle est mal organisé. Y'a un manque de professionnel de réinsertion donc parfois tu sors et t'es tout seul... Tu te vois rentrer en prison en 2000 et en ressortir en 2010 ? 10 ans c'est pas énorme en soi, mais en 2000 la technologie ça existait encore trés peu. Ils connaissent peut être pas encore le téléphone à clapet qu'on est passé aux smartphones, aux tablettes... Et y'a énormément de choses qui change dans un pays en 10 ans.
Donc au final ils sont désorientés, ils ont nul part où aller, ils ont pas d'argent... Et c'est pour ça que certains récidives. Parce qu'au moins en prison ils avaient un cadre, des régles, ils avaient pas besoin d'être totalement autonome...
Tu pourrais les priver de télé, téléphone, loisirs tout ce que tu veux, ça changerait rien au probléme de réinsertion.
Puis faut pas oublier que dans une prison, y'a pas de sections. On mélange tout le monde. Donc p'tete que le mec qui a tué 10 personnes mérite pas de pouvoir aller à la bibliothéque ou de sortir prendre l'air, mais celui qui a commis un petit délit a pas besoin de vivre dans la misére. Celui qui fait pousser du cannabis chez lui par exemple, bah oui il doit être puni mais pour moi c'est pas un drame en soi, du moment qu'il est pas impliqué dans un trafic de drogue important. Y'en a qui le font pour leur propre consommation ou alors qui en vend un peu comme un lycéen à droite à gauche, bah c'est interdit mais c'est pas non plus hyper grave en soi.
Puis la télé et le téléphone, ça permet de rester en contact avec le monde extérieur et donc ne pas être totalement coupé du monde. Ca fait parti de la réinsertion

Aprés le but c'est pas de les chouchouter et de les aider à retrouver une super vie tranquille aprés leur peine, c'est pas de les récompenser. C'est surtout d'éviter qu'ils recommencent, même si pour ça faut les aider et leur offrir quelque chose de bien. C'est avant tout pour le bien des autres selon moi
Psychiatrie/psychologie et justice 6/12 08/10/2014 à 22:55
Non mais la différence entre les frère Jourdain et un schizophrène qui tue quelqu'un en crise c'est que les frères Jourdain savaient très bien ce qu'ils faisaient. Okay avec un passé hyper carencé en à peu près tout, ça n'aide pas, mais il n'empêche qu'ils sont conscients d'eux mêmes.

Mais de toute façon, pour moi prononcer une peine de prison à l'encontre de quelqu'un qui est dans un état où sa conscience est altérée au moment du crime, ça n'a absolument aucun sens. Mais vraiment aucun. Je vois pas en quoi c'est un permis de tuer, faut réfléchir deux minutes parfois : si t'es fou comme un lapin, que dans un délire tu butes quelqu'un, c'est pas une peine de prison qui va faire que tu vas dire "oh bah merde j'ai fait une connerie", et d'ailleurs c'est pas un jugement d'irresponsabilité qui va faire que le type va se dire "ah bah c'est bon je peux y retourner", on parle de personnes délirantes quoi.

Et d'ailleurs les personnes qui sont jugées irresponsables mais qui ont commis un crime on les remet pas en liberté pour aller gambader dans les bois, ils finissent en HP et n'en sortent vraisemblablement jamais. Mais au moins en HP ils ont un traitement et ils reçoivent les soins dont ils ont besoin, ça me parait être un minimum quand même.

Enfin ce que je trouve marrant c'est que quand on écoute les gens, on a l'impression que tous les violeurs et les tueurs sont de grands prédateurs, qui font ça après avoir eu une vie chaotique et qui du coup se transforment en des espèces de machines à tuer. La plupart des gens en taule c'est vraiment pas le profil quoi.

Bon et puis pour limiter les conneries aussi : un bipolaire c'est quand même pas bien dangereux et un schizophrène c'est plus dangereux pour lui que les autres.
Psychiatrie/psychologie et justice 7/12 10/10/2014 à 11:52
Merci beaucoup pour ta réponse Dazzlious, c'est à peu près ce que je pense aussi, tu as clarifié mes idées ^^

-IdontKnow-, je suis évidemment d'accord que la mise à l'écart est impérative pour éviter la récidive, mais ce qui me dérange c'est vraiment cette notion de punition, de conditions de détention misérables et ce mépris général pour les condamnés qui devraient "payer" pour leurs actes alors que plus les actes en question sont horribles (comme le cas des frères Jourdain), plus souvent il y a de causes extérieures, d'enfances détruites, de troubles psychiatriques, etc. Et donc, au fond, plus facilement on peut "pardonner"... à mes yeux.
Les condamnations du genre de celles où l'affaire est insoutenable émotionnellement, où le crime est gratuit, le meurtrier sadique et froid, sont celles qui suscitent le plus de réactions de rejet vifs, on parle de rétablissement de peine de mort parfois, etc. Et c'est ça qui me révolte : cette relation entre crime et passé/troubles psychologiques-psychiatriques même si pas clairement identifiés est trop souvent oubliée, du moins par la majorité de la société qui blâme sans retenue le criminel.

Et de fait, je suis totalement d'accord qu'un schizophrène qui tue en pleine BDA, il n'y a absolument aucune raison ou utilité à le condamner. Et puis, comme l'a souligné Dazzlious, les schizos sont souvent bien plus victimes que bourreaux, pour bosser depuis plus d'une année sur un projet en rapport avec la schizophrénie c'est un peu la première chose qui saute aux yeux.
Je parlais justement des cas où aucun trouble clair ne peut être défini, où le criminel bénéficiait de ses capacités de discernement au moment du crime, aussi horrible soit-il. Dans ces cas-là, quand la maladie n'excuse pas entièrement, on omet à mes yeux trop souvent qu'au-delà de troubles psychiatriques qui peuvent être classifiés en "cases" réductrices, il y a derrière chaque être humain tout un parcours qui peut être chaotique et mener à des gros dysfonctionnements psychologiques, avec, ou sans troubles "sérieux" comme la schizophrénie. Et donc, condamner dans ces cas le criminel à une vie misérable sans possibilité de réinsertion ou de guérison, dans un lynchage général et une mort sociale complète, c'est le condamner pour son chemin de vie qu'il n'a pas choisi.

Par rapport à la notion de machine à tuer aussi, c'est cette diabolisation qui me gêne aussi... Aussi difficile que ça puisse être à admettre, quelqu'un qui a vécu une vie difficile, qui finit par être traumatisé, violent, développer tout un tas de mécanismes psychologiques de défense face à tout ça, saute facilement le pas entre théorie et pratique relativement à un acte criminel quelconque : c'est plus souvent une erreur due à un certain contexte qu'à l'assurance que le meurtrier/violeur ou autre se transformera en tueur en série pour le restant de ses jours.

Enfin oui, vaste débat, mais ayant suivi quelques affaires judiciaires c'est cet aspect qui m'a dérangé et je voulais avoir quelques avis. Merci Smile
Psychiatrie/psychologie et justice 8/12 10/10/2014 à 23:22
Ce n'est pas parce que tu peux expliquer un comportement que le pardon, derrière, en découle. Comportement rationnel ou non, certaines choses s'expliquent, d'autres non. Pourquoi un mec a-t-il vu un clown à la place d'un homme habillé en costard, et que, d'une pulsion, il a décidé de le tuer de plusieurs coups de couteau dans la rue ? Imaginons cinq secondes qu'il ait une phobie des clowns... Que le gars en costard se déguise en clown dans sa tête, c'est comme si on transformait un avion en train. Ca se passe dans sa tête. Même si tu expliques son acte par une phobie, ça n'explique pas l'intervention de la phobie au moment donné.

Me concernant, j'ai toujours été pour comprendre avant de juger et de pénaliser. Je ne suis pas l'actualité judiciaire non plus, mais on a toujours tendance à cataloguer les gens un peu trop vite. Je ne suis pas sûr que ça ne se passe pas de la même façon, par moment, au niveau pénal.
Du coup, je suis plutôt de ton avis quand tu dis qu'on ne va pas chercher assez loin. Maintenant, de là à retracer l'histoire complète d'une personne pour expliquer son comportement, ça me parait un peu extrême sur les bords, tout de même.
Pas dans le sens où c'est inutile. C'est toujours intéressant, dans le fond. Ca permet justement d'humaniser un peu plus la personne, la rapprocher à ce qu'on connait tous, c'est à dire son histoire, qui prouve un vécu. Après, ce n'est pas utile pour moi pour plusieurs raisons, la première étant évidente pour moi.
A un moment donné, tu ne peux plus changer les gens. Toi et Dazzlious dites que ça ne sert à rien de condamner un schyzophrène. Si j'interprète ça de façon à dire "On le condamne à perpétuité", dans le fond, j'suis d'accord. Mais d'un autre côté, le condamner, au-delà des conditions de détention, ça permet simplement d'avoir la main mise sur un potentiel danger en société. Ce qui amène un peu le deuxième point.
C'est à dire que les gens changent s'ils veulent changer. Bien évidemment, y'a des cas où ils agissent sur une pulsion (je pense à des pédophiles ou violeurs qu'on castre, ou encore quelqu'un bipolaire qui ne se contrôle pas), ça n'empêche pas de choisir d'être aidé ou non. Certains ne veulent pas. Et tu ne peux pas faire grand chose pour eux. Tu choisis d'être réceptif à des personnes et non à d'autres, tu choisis de les écouter ou d'être plus impliqué dans la relation que tu as avec eux, ou non. Pour des facteurs différents... Mais c'est toi qui fait ce choix. Certains ne le font pas et s'isolent, tout simplement.

Après, y'a certaines choses qui ne se contrôlent pas. On en entend souvent parler dans les cas d'homicides de la femme/époux et des enfants, par exemple. Ou les meurtres passionnels où tu cèdes à une rage soudaine. Mon oncle et ma tante ont récupéré un ado y'a une dizaine d'années qui a vu sa mère tuer son père de plusieurs dizaines de coups de couteaux alors que ça semblait aller plutôt bien les jours, mois, années avant ce drame. Des histoires comme celles-ci, il y en a tous les jours. Ces personnes méritent une sanction, à mon sens, parce que l'acte a été commis, peu importe la raison. Là où effectivement, on juge un peu vite, c'est que certaines personnes ne feront ça qu'une fois dans leur vie. Mais ça, tu es incapable de le prévoir. Et en France, on est légèrement trop adepte du principe de précaution, qui peut s'appliquer un peu dans n'importe quel domaine.

Donner une sanction n'implique pas nécessairement d'accorder des conditions de vie misérable à la personne sanctionnée. C'est encore un autre débat...



C'est honorable à toi de vouloir humaniser un peu plus ces personnes là. Mais me concernant, quand tu fais un choix, comme celui de céder à une pulsion, peu importe les raisons et le contexte, tu dois en assumer les conséquences. La première étant généralement la culpabilité. Après, certains sont aidés, d'autres non... On a tous des parcours différents, des rencontres différentes sur notre route. Certains ont vraiment bataillé pour se sortir de la merde, d'autres n'ont pas su le faire. A un moment donné, ça relève de la personnalité de chacun. Volonté, abnégation, détermination de ne pas faillir, de s'en sortir. Naiveté, idéaliste, utopiste pour ensuite être déçu quand on s'aperçoit qu'on voulait s'en sortir, qu'on a cru s'en sortir et qu'on est finalement engagé dans une spirale plus négative que précédemment (je pense à certaines femmes qui se prostituent, utilisent l'argent gagné pour se faire plaisir, ne plus pouvoir payer les factures et recommencer. Idem avec les jeux d'argent style casinos....).

Notre passé nous façonne, tous les jours. C'est indéniable. Après, y'a le passé où l'on subit et le passé où l'on est acteur. Certaines choses sont imputables aux parents et autres personnes d'influence qui nous entourent, d'autres sont imputables aux choix qu'on fait. Si on doit juger la responsabilité d'une personne de 60 ans en allant voir s'il n'y a pas un traumatisme du à une éducation trop stricte, violente et sévère lors de l'enfance... Il n'est pas responsable de l'éducation qu'il a reçu. Mais il est responsable de ses actes, car, à tout moment, il aurait pu choisir de soigner son passé et l'accepter plutôt que le rejeter sur sa progéniture jusqu'à un jour, franchir le pas par dépit, colère, pulsion... Ca ne le rend pas moins humain. C'est juste que c'est beaucoup plus simple de critiquer les autres du mal qu'ils font plutôt que se regarder dans la glace et évaluer le mal qu'on fait quotidiennement à notre échelle.
Psychiatrie/psychologie et justice 9/12 11/10/2014 à 10:34
Autant je suis d'accord sur le fait qu'il est important de rappeler que les types en taule ne sont pas des sous-hommes, autant je trouve qu'il ne faut pas non plus tomber dans l'excès inverse qui consisterait à dire que sont de pauvres petites choses coupables de rien.

Okay y a des circonstances, mais on ne peut pas oublier les faits non plus. Les hommes ont créé des lois pour vivre ensemble, ça me parait normal que les gens qui ne respectent pas ces lois soient condamnées.

Et je le redis, la plupart des personnes en prison ne sont pas en majorité des espèces de victimes de la vie avec un passé hyper lourd, un père qui leur faisait bouffer leur merde ou je ne sais quoi encore, la plupart des viols sont des viols opportunistes commis par des personnes qui connaissent la victime (donc pas le grand prédateurs victime de ses pulsions qui traque ses victimes des jours avant de passer à l'acte), et les homicides sont des homicides involontaires (style accidents domestiques même si je déteste ce terme).

Un rappel à la loi est nécessaire, on peut pas tomber dans la pathos et dire que tous les criminels sont des victimes. Sûrement le sont-ils, des victimes d'eux-mêmes probablement, mais la loi reste la loi.

Maintenant quand je dis qu'un rappel à la loi est nécessaire, il est nécessaire si la personne peut le comprendre, c'est en ça que je dis que condamner un schizophrène n'a absolument aucun sens. PAr contre je le redis, un type qui commet un crime dans un moment de folie, même s'il n'est pas condamné il est systématiquement placé en HP et d'ailleurs il en ressortira probablement jamais (contrairement à la prison ironiquement).

Bon par contre va falloir m'expliquer le coup des pulsions des bipolaires là =O
J'ai rien compris et les bipolaires franchement je vois pas d'où ils seraient dangereux et pourquoi on les foutrait dans le même panier que les violeurs en série là. Déjà qu'on se fait tout un truc des schizophrènes alors qu'au final ils finissent plus par se suicider que par faire du mal aux autres...
Peut être que je pinaille mais en même temps quitte à débattre autant éviter de dire des conneries.
Samoth 
Psychiatrie/psychologie et justice 10/12 11/10/2014 à 12:45
Si je te suis Leana, il me paraît difficile de ne pas complètement remettre en cause l'idée de "responsabilité" : nos actes, qu'ils tombent ou non sous le coup de la loi, peuvent toujours s'expliquer par notre histoire personnelle. Ce que tu reproches à la justice, si je comprends bien, c'est de considérer que les troubles psychiques nous exonèrent de notre responsabilité (grossièrement), alors que ce n'est pas le cas d'autres éléments de notre histoire personnelle, que nous n'avons pas plus choisi et dont nous ne sommes pas plus responsables, mais qui peuvent aussi bien expliquer un crime. C'est ça ?

Dès lors qu'on considère la culpabilité comme un mirage (puisque nous ne sommes jamais tout à fait responsables de nos actes), la justice ne peut plus être défendue que comme un outil de régulation sociale, visant d'une part à dissuader les actes criminels, et d'autre part à réinsérer les fauteurs de troubles dans la société, ou à défaut de les en maintenir à l'écart.
Psychiatrie/psychologie et justice 11/12 11/10/2014 à 16:38
White Shark : c'est justement le "problème" que j'ai : dès lors que je comprends les raisons qui motivent un certain acte - d'une part, il y en a toujours, d'autre part, je cherche toujours à tout comprendre au maximum -, je ne parviens plus à en vouloir à qui que ce soit. Parce que la vie est telle que les évènements se succèdent pour former un individu qui n'aura pas décidé de sa personnalité qui peut le pousser à commettre des actes pourtant considérés comme impardonnables.

Pour le coup du criminel qui ne souhaite ni changer, ni s'intégrer dans la société, j'avoue ici que l'emprisonnement est la seule solution, malheureusement pour lui. Mais je pense au fond que ce genre de personnes représente une très nette minorité : personne n'aime souffrir, et ceux qui se retrouvent condamnés pour le(s) crime(s) qu'ils ont commis sont rarement épanouis. Même si la personne prétend ne pas vouloir changer, j'estime que ce genre de discours relève plus d'un certain découragement, d'une résignation, d'un sentiment de différence claire, qu'à une réelle volonté de rester à jamais dans la même façon d'être et de vivre

Pour la notion de choix face à l'acte commis, dans mon schéma de pensée, il n'existe, de fait, pas vraiment. Je pars peut-être un peu loin, je l'admets, en déculpabilisant tout et tout le monde : mais je ne parle pas ici d'actes quotidiens, de choix personnels, mais de cas "extrêmes", c'est-à-dire d'un acte criminel qui demande une certaine dose de prédispositions et peu, à mes yeux, de réel choix.

Oui, la loi existe et doit être respectée pour que la vie en communauté soit possible. Je suis entièrement pour la condamnation, à perpétuité s'il le faut pour certains cas particuliers, de ceux qui représentent un danger pour la société et pour eux-mêmes.

Mais le problème à mes yeux réside vraiment dans la structure d'incarcération et la démarche qui y mène : pour exemplifier ma pensée, j'ai lu un article hier sur le tribunal des mineurs. Ce dernier se glorifiait d'avoir créé une structure brillante pour ne pas que les mineurs soit jugés comme des adultes, et cette structure mettrait fortement l'accent sur l'éducation, la "guérison", plus que sur la sanction. C'est en effet une très bonne idée et certaines structures me paraissent très correctes dans cette possibilité de donner une autre chance à des adolescents. Mais ce qui m'a profondément révolté, c'est cette distinction claire et nette : à 17 ans et 11 mois, notre personnalité se déterminerait-elle ad vitam aeternam ?! Et on passerait de la rééducation, de l'apprentissage, de la protection de l'identité du mineur, de la volonté d'aider et de réintégrer à une sanction tranchée, à une diabolisation parfois complète, à une mise à l'écart totale dans des conditions inhumaines ?

L'HP est une structure adaptée (.. c'est discutable, mais ce n'est pas la question ici) pour ceux qui souffrent de troubles psychiatriques qui auraient poussé à un crime où le discernement aurait été nettement altéré. Mais pour les autres, la prison ne résout à mes yeux strictement rien : pas de réintégration, une mise à l'écart de la société encore plus marquée par totale perte de repères, d'accroche avec l'extérieur... à la sortie, soit ils se sont fait des connaissances peu recommandables et se sont nourris les uns les autres de leur différence, et recommenceront, soit ils récidiveront uniquement dans le but de retourner en prison, seul monde qu'ils ont fini par connaître.
Pour une partie des condamnés, j'admets que la sanction peut être éducative et ils comprendront la gravité de leur geste, puis finiront par se réintégrer. Mais je crois que pour la majorité, la prison n'est qu'une belle mise à l'écart qui aggrave l'état psychique du condamné.

En fait, je me répète un peu, mais merci beaucoup Samoth pour ton résumé parfait de ma pensée, c'est très clairement ce que j'essaie d'exprimer par mes pavés confus ^^
En effet, la prison est une dissuasion, mais uniquement pour moi une mise à l'écart et non une façon de réinsérer le condamné, malheureusement. C'est un peu un aveu d'incapacité de la société à s'occuper de ceux qui s'en sont séparés : on les isole pour la sécurité de tous, mais on ne sait pas les aider.
Samoth 
Psychiatrie/psychologie et justice 12/12 11/10/2014 à 19:35
Leana8 a écrit :

En effet, la prison est une dissuasion, mais uniquement pour moi une mise à l'écart et non une façon de réinsérer le condamné, malheureusement. C'est un peu un aveu d'incapacité de la société à s'occuper de ceux qui s'en sont séparés : on les isole pour la sécurité de tous, mais on ne sait pas les aider.




C'est en effet l'aveu d'une impuissance. Mais en même temps, ce n'est pas comme si la totalité de l'effort politique à ce niveau était tourné vers la mise au point de dispositifs de réinsertion plus efficaces. J'ai l'impression que notre conception de la justice est toujours largement dominée par le modèle de la punition. Spontanément, sans trop y réfléchir, il nous semble évident que celui qui enfreint la loi mérite d'être puni. Et les débats portent toujours sur la sévérité des peines et la dureté des conditions de détention - or, ce n'est pas simplement en allégeant les premières et en améliorant les secondes qu'on pourra transformer des délinquants ou des criminels en citoyens modèles...

Il manque une prise de conscience pour que les choses évoluent.
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