Rencontrer quelqu'un à 1000km (suite encore)

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l-arwen   Rencontrer quelqu'un à 1000km (suite encore) 0 18/04/08 à 12:37

En attendant, la maison de Julien semblait notre seule destination possible, mais nous en étions exclus pour y coucher. Sa bonne volonté me dépassait, il faisait tout pour nous aider, et continuait à réfléchir. Constance de son côté exprimait son malaise qui lui donnait envie de vomir et qui n'aidait pas à nous sauver. Impuissants, nous nous agitions vainement. L'émotion n'aide pas lors d'un naufrage.

Julien se rappela soudain qu’un bâtiment était en construction et que ses portes restaient ouvertes la nuit. Personne ne le crut, et nous allâmes vers ce lieu irréel. On dut enjamber sans éclairage une grande flaque d’eau qui s’amassait sur le bord du parking, et derrière une haie, le Neuropolis apparut. Julien tira la porte. Elle s’ouvrit. Nous étions sauvés. Une jubilation démente s’empara de nous. Il était celui qui avait trouvé une place au sec et permettait notre nuit. Même sans lit ni chauffage, ce lieu neuf encore en travaux devenait un palais royal. « C’est un hôtel moins deux étoiles ! », ironisa-t-il. Son humour résolvait tous les problèmes. On visita : un large escalier montait sur deux étages. L’éclairage intérieur était déjà installé, avec minuterie, mais pour la discrétion, mieux valait évoluer dans les seules lampes de secours. Le haut de l'escalier semblait la meilleure place à occuper. Cette joie extrême était indescriptible et ridicule, et si Sharwyn m’avait dit à mon arrivée : « Tu sais, on dormira dans un bâtiment en construction. », je lui aurais exprimé ma déception, alors que là, cette offre était transformée en merveille par les heures de lutte pour trouver où dormir. Sharwyn et moi y avions consacré, en somme, tout notre après midi, et là, un secret volé à la nuit se livrait à nous, sous la lumière du triomphe.

Julien accepta de nous prêter des sacs de couchage, on repassa chez lui, et sa mère trouva suspect qu’on les emporte pour dormir chez... une amie. Comme prévu, Constance rentra chez elle, mais ce n’était pas la chambre qui nous attendait. Nous fîmes à nouveau le chemin vers le Super U, savourant une victoire, la route semblait apaisante, seuls les lampadaires dévisageaient avec bienveillance les façades fermées. Un piège était déjoué, et la terra incognita devenait terre alliée. De la nuit, Sharwyn aimait cette douceur décolorée qui sert toujours de trêve aux cœurs agités. Notre bâtiment nous attendait, comme une embarcation attend ses derniers passagers, on monta au deuxième étage qui formait une sorte de palier pour l'ascenseur et une porte vitrée fermée à clé. Un espace de deux mètres sur deux servirait de lit, la géométrie convenait, mais pas la dureté du sol. Au moins, nous étions au sec, dans notre navire inerte dont le toit rejetait la pluie. On étala un sac de couchage, et l'autre servit de couverture pour nous deux. L'espace proche d'elle se créait, dans une chaleur faiblement partagée, entre deux couches douces où, tout habillés, nous étions. Notre fatigue évoquait une heure tardive, mais il n'était que 21 heures.

La grande traversée nocturne commençait, dans un vide immobile que l'aube seule terminerait. Mais l'espoir de cette aube ne semblait qu'une promesse folle, une nuit si épaisse ne se résoudrait jamais.

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