Sans repère

« Sans repère »

Entre deux heures de cours, assis devant le lycée, une amie fit jouer à son portable un vieil air rap, histoire d'un enfant sans père.

En premier lieu, je n'avais pas réagis à l'écoute de cette musique familière, mais voilà, au bout de quelques secondes, les informations du cerveau étaient parvenues au cœur. Je me revoyais, 2 ans auparavant, enfermé dans ma chambre, pleurant à chaudes larmes une dispute, quoiqu’habituelle, avec mon père.

Cela faisait 1 an que l'on avait déménagé et je n'avais toujours pas réussi à trouver ma place dans cette ville ainsi que dans ma propre maison, je m'étais rapproché de ma sœur mais je n'avais su être autre chose qu'un interlude entre ces conquêtes, une épaule pour pleurer et une oreille pour écouter.

Je parlais quelques fois avec ma mère mais je n'avais jamais vraiment voulu tout lui dire, de peur de lui faire honte, sans qu'elle ne le veuille vraiment, ou peut être juste de la décevoir. Moi qui avais toujours été le petit garçon qu'elle aimait tant, un des plus attentionnés de tous, droit et sérieux mais toujours un brin enfant. Je n'aurais pas voulu lui dire le malaise qui me touchais et la noirceur de mes idées.

Et mon père, ah mon père, j'en étais réduit à, dans ma tête ne plus le nommer ainsi, il était devenu mon géniteur, le mari de ma mère, le con qui vit à la maison. Je ne l'aimais pas et il me le rendait bien, je le haïssais chaque jour un peu plus, il était instable, maniaco-dépressif. Je ne supportais pas sa présence, ces paroles m'agaçaient et ses sarcasmes me tuaient.
Il ne savait m'inspirer que du dégoût et le seul but de ma vie ne fût -pendant des années- que de ne pas lui ressembler.
Je l'avais pris en horreur, il était le diable et j'étais l'enfant perdu dans la nuit noire, je pleurais chaque soir de ne pas m'être fais aimé de mon père et de n'être que son fils.

Il était 21h et comme souvent le soir, je m'étais engueulé avec lui, et j'avais fini par craquer au moment ou il m'avait dit qu'il était encore mon père et que je n'avais pas à décider quoi que ce soit à sa place.
« Tu n'as jamais été un père pour personne dans cette maison, tu ne commenceras pas aujourd'hui. » -
Je repartais dans ma chambre.
Je pleurais toutes les larmes de mon corps en écoutant cette musique et je me demandais ce que je faisais dans cette maison, aux côtés d'un fou furieux.
Le lendemain matin, vers 9h, je m'étais levé tôt car vite assoupi sous le flot des larmes, je descendais les escaliers, doucement, et j'entendais mon père parler à ma mère.

« Il serait mieux dans un internat, je ne le supporte plus, je ne veux plus le voir. »

Mon cœur se brisa et je ne savais plus comment réagir, je remontais quelques marches, puis les redescendais dans un vacarme assommant, j'entrais dans la cuisine, arborais mon plus beau sourire et alla jusqu'à la salle de bain.
Je me suis assis par terre et j'ai arrêté de penser, j'ai fait le vide dans mon esprit.

C'est ce jour là que le masque n'a plus quitté mon visage.

Il m'avait blessé en plein cœur et je me disais que plus jamais il n'aurait le bonheur de me voir exprimer un seul sentiment pour lui, bon ou mauvais.
Il aurait un fils indifférent qui ne l'aimerais plus, il n'est rien de pire que de n'être rien pour les autres, il m'avait fait l'objet de sa haine, j'avais fait de lui rien.
Un vide total, un non-père, le néant du néant, la poussière de l'étoile infini qui stoppe sa course dans l'univers au plus loin de moi.

Je me voyais, dans un soir d'été à discuter avec lui de souvenirs, de la vie qui serait belle et du temps qui passerais ... sans soucis
J'avais la nostalgie du temps qui n'étais pas passé, la déprime d'une nouvelle passade qui serait jumelle l'ancienne.
Je sombrais dans les délires d'un cœur abandonné pas son dieu, il n'en était pas un.
J'étais seul, je rageais de moi-même, je rageais d'être moi et rien d'autre.

M'en allant dans ma chambre, me griffant, me mordant les lèvres à sang, tremblant, un cutter à la main je me faisais du mal, pour me punir de n'être que moi, pour me punir de ne pas lui convenir, de ne pas être le fils qu'il aurait voulu.
Car oui ... tout était de ma faute au final, je n'étais pas le fils dont il rêvait.
Je n'étais pas celui avec qui il aurait voulu passer tout son temps, celui avec qui il rêvait parler de belles voitures et jouer au foot.
Moi je préférais écrire, je préférais penser, et des mon plus jeune âge, j'avais délaissé les cages de foot de mon père, pour les « jupes de ma mère »
Je n'étais pas celui qu'il voulait, j'étais un efféminé, un garçon assez réfléchi pour lui déplaire et si j'avais pu aimer le sport, les voiture et les filles à outrance, je l'aurais fait.
- Mais voilà je n'étais que moi.-
Alors papa je m'excuse de ne pas t'avoir plu, de ne pas avoir été l'objet de ton admiration, de ne pas t'avoir fait passé tes dimanches après midi, aux matchs de ton fils, qui bien sûr aurait été le buteur de l'équipe, le meilleur, le vainqueur…
J'aurais voulu lui écrire des lettres pour lui dire à quel point j'étais désolé, mais il m'aurait blâmé de ne pas être franc, il aurait eu honte de son fils qui n'étais pas un homme fort, et qui avait besoin de se faire excuser.
J'aurais avoué toutes mes erreurs si il l'avait fallu, encore une faiblesse.
J'aurais bien essayé de me mettre au sport, mais j'échouais à chaque fois.
M'intéresser aux « trucs de mecs » ... j'avais beau faire celui qui adorait, mais non je m'ennuyais immanquablement et j'étais incapable de jouer correctement la comédie devant les yeux de mon père.

Alors qu'étais-je dans tout ça ?

Je sentais son regard dans mon dos à chaque nouvelle gaffe, je savais ce qu'il pensait, je ne me l'avouais pas toujours mais je le savais.
Je me cachais derrière ce que j'étais sensé penser de lui ... un gros con.
Mon gros con ... mon papa.
J'en parlais à ma mère ...
« Ton père t'aime, ne t'en fait pas, allé embrasse moi et va jouer »
Le cutter qui entre dans ma peau, la lame salvatrice, la fuite violente, le sang qui coule, moi qui l'avale. Dans ce sang, j'avalais ma douleur et dans mes larmes je la rejetais.
Des pleurs ... j'étais une pédales, une tafiole, un incapable, une merde, ....

Un pd.

J'étais ...


Rien.

Dans les bras de ma meilleure amie, les larmes coulèrent, nous retournions en cour, j'avais tout oublié.






VOilà un autre :fleurs:

3 derniers commentaires sur le poème


ptitalex [ le 03-08 à 23:18 ]
Le sujet "anulingus les filles aiment ou pas ?" cartonne en ce moment... création et littérature ne fait pas le poid ^^ Vive SE, temple de la culture :siffle: Shin.
Respire [ le 03-08 à 17:11 ]
C'est très beau, j'aime beaucoup =D
Frosties [ le 03-08 à 17:08 ]
Disons, que la deuxième partie (si si je me permets de diviser le texte en deux parties, muahahaha), est meilleure que la première, aussi bien au niveau du style que dans l'histoire.

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