E8i65 (nouvelle)

Nouvelle métaphorique de la société actuelle, piochant dans le cinéma, la philo, et la musique^^ un peu partout quoi :P


Par FiSSton, 34 ans
Ajouté le 24/04/2006
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Enjoy your reading ! :D


E8i65

La première fois qu'Aurélien vit Bérénice, il la trouva franchement laide. Il la trouva laide.
Bérénice, c'est notre instit, à moi et Aurélien. C'est pas son vrai nom, Aurélien, c'est moi qui lui ai donné. Son nom à lui, c'est E7c82, mais je préfère celui qui je lui ai trouvé. Le mien, c'est E8i65, il ne sonne pas si mal. Bérénice, c'est pas le vrai nom de l'instit non plus, mais son nom à elle, on ne l'a jamais connu.

Aurélien et moi, nous vivons à NeoUtopia, la Cité Mère de toute cité comme la décrivent les livres qu'on lit. Tous écrits par le même auteur, un auteur NeoUtopien. Un Artist, comme ceux qui dirigent la Cité, et la vie de ses habitants, l'ont appelé. Les Artists sont ceux qui pensent, les Ouvriers sont ceux qui travaillent et les Soldats, ceux qui meurent. Ils sont désignés dès leur naissance.


Si le garçon est né un jour pair, il devient Soldat, s'il est né un jour impair, il devient Ouvrier. Et si dans le tas, on en trouve qui répondent positif aux tests évaluant leur capacité à penser, ils deviennent Artists. Pour ne pas les laisser penser seul, on leur lave le cerveau, et on leur implante une puce à l'intérieur qui explose si l'Artist commence à penser de lui-même, contre la Cité…

Pour les femmes, les choses sont un peu différentes. Les jours impairs créent des cultivatrices, chargées du travail dans les champs et de préparer la bouffe pour leur quartier. Les jours pairs, créent des reproductrices, chargée de la continuité de NeoUtopia. Mais les membres dirigeant la Cité, les Neufs ou la Caste, c'est comme ça qu'on les appelle, préfèrent que les reproductrices les moins efficaces servent de professeurs aux jeunes. Chez les femmes aussi il y a des Artists, mais la plupart finissent dans le harem de la Caste…

Bien sûr, il y a des fuites, et des Artists parviennent à passer outre les tests. Ceux là, on les appelle les Djious. Les Djious ne savent même pas qu'ils sont des Djious. Ceux de la Caste les cherchent, ils les persécutent, et dès qu'ils en trouvent, ils les envoient au PointZ, le lieu d'où personne n'est jamais revenu. Si on les chasse, c'est parce qu'ils pensent par eux-même, et de ce fait, pourraient nuire à la Cité.


Nous ne sommes que deux dans la classe, Aurélien et moi, et Bérénice arrive toujours en retard, c'est grâce à ces retards que j'ai appris à mieux connaître Aurélien. Mais quand elle arrive, on doit se la fermer, et écouter. Ecouter l'instit nous bourrer le mou…

Aujourd'hui encore, Bérénice ne manquera pas à ses habitudes, elle arrivera en retard, j'en suis sûr. Alors je vais un peu causer avec Aurélien, comme d'habitude. Mais aujourd'hui je veux savoir s'il sait se servir de sa propre capacité de réflexion, non pas pour le dénoncer, mais pour voir si le monde est aussi triste que je le crois.

- Dis-moi Aurélien, que je lui dis, t'es né quand, toi ?
- Je sais pas, qu'il me répond, on m'a juste dit que c'était un jour pair.
- Tu vas devenir un brave petit Soldat alors.
- Ouais, et je m'en plains pas ! Le travail crevant de l'usine, non-merci. Et toi ?
- Moi ? Jour impair.
- Futur gentil petit Ouvrier ! qu'il me dit en souriant.
- Les coups de feu et les morts, non-merci ! que je lui réponds sur le même ton.

Bérénice n'est toujours pas là, on s'en fout royalement ! Tant mieux, même ! Et moi, de mon coté, j'ai une furieuse envie de me tirer de cette classe puante et étouffante.

- Dis-moi Aurélien, que je lui dis, si tu sais déjà ce que tu vas devenir, que ton destin est déjà tracé, tu penses que ça te sert à quoi ce que la vieille Bérénice nous fout dans le crâne ?
- J'en sais rien, qu'il dit, on me dit d'apprendre, alors j'apprends.
- Même si on ne t'en donne pas le but, ou la raison ?
- Même si on ne m'en donne ni le but ni la raison.
- Mais ça te plairait pas de savoir ce que ça fait que de penser sans les cours que nous envoient les Neuf ?
- T'es fou ou quoi ? Je suis pas un Djiou ! Par contre, toi, je me pose des questions parfois…
- Qu'est-ce que tu vas me faire si j'en suis un ? Me dénoncer ?
- Je te dénoncerai pas, parce que t'es mon ami, que je t'aime bien, mais si tu veux du mal à la Cité, je n'hésiterai pas à les mener jusqu'à toi.
- Tu ne ferais que ton devoir de NeoUtopien, je le comprends. Mais éprouver un semblant d'affection pour moi, d'après toi, c'est pas penser quelque part par toi-même ?
- Je pense par moi-même ! Mais je ne suis pas un Djiou !
- Non tu n'en es pas un, mais on te laisse l'illusion de croire que tu penses par toi-même…
Tu te rappelles la radio que j'ai trouvé dernière les murs de ma cellule ? La radio que je t'ai montrée, faite écoutée.
- Oui…
- Je me rappelle que tu as presque pleuré en entendant une autre musique que celle d'ici. Moi aussi avant toi, j'avais eu la même réaction, la première fois. Et tu sais ce que ça montre ?
- Non…
- Que quelque part, nous sommes des humains indépendants, toi et moi.
- Des Djious ?
- Presque… Hier soir, j'ai entendu une nouvelle chanson à la radio, elle disait We don't need no education.
- Qu'est-ce que ça veut dire ?
- Je sais pas, mais ça sonnait tellement bien et juste…

Dehors, on entend la marche des Ouvriers du jour qui partent prendre le relais des Ouvriers nocturnes. Ils marchent en rend de 5, tous d'un même mouvement. Même les Soldats ne sont pas aussi disciplinés. Bérénice ne montre toujours pas le bout de ses rides. Moi, j'en ai vraiment trop marre, alors, je me dis que je peux me barrer d'ici. Et puis, en dehors de la classe il y a un autre monde que j'ai toujours rêvé de découvrir de mes propres yeux !

- Dis-moi Aurélien, que je lui dis, je vais faire un tour dehors aujourd'hui, tu veux venir avec moi ?
- Et le cours ? qu'il me répond.
- Quoi qu'on m'enseigne, je finirai Ouvrier… Les cours me servent à rien…
- Ceux qui ne bossent pas partent au PointZ ! Fais pas de conneries !
- Aurélien, si c'était vrai, les moteurs ne tourneraient plus depuis longtemps…
- Fais comme tu veux, moi je reste, les meilleurs Soldats sont les Soldats cultivés !
- T'es sûr ?
- Affirmatif !
- Très bien. Alors, au revoir E7c82.

Je me suis levé de ma chaise et je suis sorti de la salle. Aurélien, il pense que je suis un Djiou, j'en suis sûr. Moi, je pense que je pense, mais je ne pense pas être un Djiou. J'en ai rencontré un, un jour. Il était sympa. Il m'a appris pas mal de choses utiles contrairement au futilités de Bérénice. Je l'avais appelé Albert. Il m'a dit où se trouvait l'émetteur qui permet à la Caste de localiser chaque habitant de la Cité, dans la première prémolaire à droite. Je l'ai arrachée, et je la garde dans ma poche. Mais, aujourd'hui, je l'ai laissée sous mon pupitre, comme ça, quand Bérénice voudra prévenir les Neuf de mon départ, ils me croiront toujours en classe, et vu que Bérénice ne peut pas leur parler directement, après leur premier refus, elle devra aller les voir en personne. En résumé, j'ai au moins trois jours de repos devant moi.


Je suis les Ouvriers, leur marche. Je veux voir où je vais travailler plus tard. L'usine. Elle est immense. Les murs sont brûlants, même de l'extérieur. L'air à l'intérieur est encore plus bouillant, d'après les rumeurs. Et quand je vois les Ouvriers mettre leurs masques devant la bouche 10 mètres avant la porte, je ne peux que les croire. Et la lumière rouge qui sort de derrière les portes et les visages noirs des Ouvriers partant confirment mes pensées. Je suis la marche des Ouvriers sortant, je vais parler à l'un d'entre eux. L'age adulte a dû leur fournir un semblant de réflexion !

Je marche à présent à coté d'un Ouvrier, le visage noir, traits tirés, fatigué. Je regarde son avant bras droit, j'y lis le matricule du corps : A4f45. Je regarde le poignet gauche, il est marqué de larges entailles…

- Bonjour A4f45.

Il ne me répond pas.

- Dis-moi A4f45, ça te dérange si je te donne un autre nom ?

Toujours pas un mot de sa part.

- Le silence doit être synonyme d'affirmation… Voyons, comment je pourrais t'appeler ?… Arthur ? Ça te va ? En plus ça colle avec ton initiale !… Dis-moi Arthur, est-ce que les cours de ton enfance te sont d'une grande utilité ?
- Ecoute petit, qu'il me répond enfin après un long silence, j'ai travaillé toute la journée, je suis fatigué. Trop fatigué pour te parler.
- Tu ne peux pas me répondre ?
- Tu veux savoir ce que les cours m'ont appris ? Ils m'ont appris que NeoUtopia est la seule Cité qui mérite d'accueillire la vie, que chacun des habitants contribue à la prospérité de la Cité, les cours m'ont appris à compter. Compter… A compter les entailles, à compter les accidents, à compter les heures passées dans la fournaise, à compter ces secondes que je surmonte bravement… Mais une chose que l'école ne m'a pas apprise, et que l'usine m'a enseigné, c'est que le travail nous réunis et efface les différences… Au milieu de tous ces visages noirs, on ne parvient même plus à discerner couleurs naturelles et artificielles…
- Et tu n'as jamais eu envie de voir au-delà de NeoUtopia, Arthur ?
- Il n'y à rien au-delà de NeoUtopia, si ce n'est l'Ennemi que nous, Ouvriers, contribuons à combattre par notre travail. Et ne m'appelle pas par ce nom grotesque, je suis A4f45, pas Arthur !
- Tu ne penses donc pas, l'éducation que l'on t'a donné t'a totalement formaté, mon pauvre Arthur…
- Je ne suis pas un Djiou, le PointZ ne m'intéresse pas ! Et ne m'appelle plus Ar…
- Pourtant ces marques sur ton poignet ! Ces mutilations que tu t'infliges, cette souffrance, ce désir d'en finir, cela montre bien que tu n'es pas une machine ! Mais que tu peux penser et ressentir !
- Ces entailles viennent des machines qui déchirent la peau par leur chaleur si on les effleure…

Les paroles de l'Ouvrier me secouent intérieurement. Un séisme de magnitude 12 vient de traverser mon corps. Je ne parle plus, je soupire… Difficilement.

- Arthur…
- Ne m'appelle plus comme ça, petit, je suis A4f45.
- Tu sais Arthur, que je lui dis difficilement en essuyant cette larme qui chatouille ma joue droite, j'arriverai à te convaincre, à te faire penser par toi-même ! J'arriverai à tous vous faire penser par vous-mêmes ! J'aime la Cité, tout comme toi, tout comme vous, mais nous pouvons vivre avec elle en suivant notre propre réflexion. Penser n'est pas un crime !
- Vas-t'en, tu n'es qu'un sale Djiou ! qu'il me dit sans me regarder.
- Peut-être… Au revoir, Arthur.

Je m'éloigne de la marche. Arthur, malgré son conformisme, est illuminé à mes yeux. Son comportement est entièrement façonné. Il m'a choqué. Je ne peux détacher mon regard de sa démarche, droite, programmée, conduite, endoctrinée. Jusqu'au moment où un simple geste vint me rendre espoir de trouver l'homme en lui, de passer outre la machine. Il a tourné la tête. Il a brisé son conformisme au milieu de ce rang si propre, si parfait, pour laisser entrevoir l'espoir d'une pensée future. Il a tourné la tête.


Quand je repense à Aurélien, Bérénice doit s'acharner sur lui. Le pauvre, il est seul dans cette classe blanchâtre. Et Bérénice, cette vieille loque… J'imagine deux réactions possibles pour elle : soit elle est déjà en train d'essayer d'alerter la Caste en martelant le bouton rouge dans le coin gauche de la classe avec ses grosses mains, sur lesquelles des bourrelés de graisse arriveraient à se glisser, par manque de place ailleurs, soit son champ de vision n'est pas assez développé, et les deux fentes lui servant d'yeux, soulignées de cernes dignes des plus larges poches de supermarché, ne lui permettent pas de voir que je ne suis même pas à ma place… Désolé Aurélien, tu aurais dû accepter mon invitation.

Et c'est en pensant à Aurélien que je vois se dessiner à l'horizon un rang de Soldats, armés, se dirigeant vers la porte gigantesque de la Cité. Cette porte d'or, dont on ne peut voir le haut, qui mène vers le champ de bataille. Ces Soldats sont si jeunes, beaucoup plus jeunes que les Ouvriers… J'ai été surpris de me rendre compte que les Soldats avaient une marche désordonnée, sans rythme, à croire que ceux qui allaient au combat étaient les Ouvriers. Après tout, les Ouvriers se battent à leur façon, avec leurs mains, les Soldats, eux, avec leurs armes et leurs balles meurtrières. J'aurais préféré parler aux femmes avant de les voir, eux, mais manifestement, je n'ai plus tellement le choix. De toute façon, cela ne change rien, et en tant que garçon, c'est peut-être mieux que je vois les métiers masculins avant les autres… J'arrive aux cotés d'un des combattants, je lis l'inscription marquée au fer rouge sur son avant-bras droit.

- Bonjour T1o00 !
- Salut toi ! qu'il m'a aussitôt rétorqué. Comment ça va, bonhomme ?
- Ben je suis parti en vadrouille, les cours me gavent plus qu'autre chose, et de toute façon, ma route est toute tracée, je sais ce que je deviendrai, que j'étudie ou non !
- Tu me rappelles moi quand j'avais ton âge, qu'il me dit avec un sourire, toi aussi tu vas devenir Soldat ?
- Non, je suis un Impair, moi. C'est la forge et la chaudière qui m'attendent !
- Pas de chance…
- Je préfère ça aux coups de feu et à la rage de la guerre…

Dès que j'ai dit ça, il a éclaté de rire.

- Ta naïveté me plaît beaucoup, bonhomme ! qu'il me dit. Tu es encore jeune, mais bien vite tu comprendras que les apparences sont trompeuses. Les Soldats, à coté des Ouvriers, c'est le paradis !
- Je ne comprends pas, tu es sadique au point de prendre plaisir à voir mourir tes compagnons ?
- Je vais te confier un secret, bonhomme. Ou plutôt, je vais te le faire découvrir…
- Je ne comprends pas.
- Tends les oreilles, écoutes… Qu'est-ce que tu entends ?

Il laisse un long silence.

- Rien. que je me suis enfin décidé à répondre.
- Le voilà le secret de la vie de Soldat ! Nous ne combattons rien ! Tu ne sais pas ce qu'il y a derrière ces murs, mais tu peux facilement le deviner… Les Artists sont forcés de diffuser la propagande, mais on ne contrôle jamais un Artist. Tu vois, dans chaque affiche, chaque texte, chaque chanson, les Artists montrent la guerre aux portes de la cité, tu sais pourquoi ?
- Non.
- Parce qu'ils veulent te faire comprendre qu'elle n'existe pas cette guerre ! Entends-tu des coups de feu ? Des tirs de canons ? Des explosions ? Vois-tu des blessés affluer ? Entends-tu des cris d'agonie ? Non ! Tu peux alors penser que la guerre est loin ailleurs, mais entends-tu des camions démarrer ? Vois-tu passer des jeeps ? Vois-tu décoller des avions ? Non plus ! En fait, ce qu'il y a derrière ces portes, c'est un allé simple pour le PointZ…
- Le PointZ ?! Mais, c'est impossible ! Pourquoi envoyer des Soldats directement dans le broyeur ? Il n'y a aucun sens à ça ! A quoi servent les Soldats s'il n'y a pas de guerre ? Et l'Ennemi, qu'en fais-tu ?
- L'Ennemi est le prétexte pour créer des Soldats, bonhomme ! L'Ennemi n'est pas un ennemi, l'Ennemi tu sais ce que c'est ? L'Ennemi c'est une idée ! L'Ennemi c'est une excuse à tout cela ! L'Ennemi, tu l'as imaginé tout seul avec la propagande. En vérité, l'Ennemi, nous ne pouvons le combattre, car le véritable Ennemi, c'est tout simplement notre cerveau ! Si crédule ! On peut lui faire croire ce qu'on veut, du moment qu'on a les mots pour le convaincre… Mais ni moi ni les Soldats ne pouvons vous sauver de l'Ennemi, parce que combattre ton cerveau, revient à combattre la Caste, or, la Caste contrôle tout ! Il suffira pour renverser la Caste de trouver la personne qui aura le pouvoir de convaincre les masses, de donner la capacité de penser aux foules, pour renverser les Neuf ! Penser est notre salut, penser est le seul combat ! Dans cette ville, on veut t'apprendre à penser, or, penser est inscrit en chacun de nous, que tu sois instruit ou non, inconsciemment, tu penses, donc tu vis…
- Attends une minute ! Si les Soldats n'ont pas de but, alors quel est le but des Ouvriers ? Quel est le but du rôle des femmes ? Nous sommes tous liés ! Si je suis ce que tu dis, quel est le but de la Vie même ?
- Quel est le point commun entre toutes les Vies ?
- Leur fin, la Mort.
- Alors le but de la Vie est de mourir ! La seule chose que l'on peut faire c'est attendre qu'elle arrive. Pour cela, nous devons nous divertir, d'où l'existence de l'école, d'où l'existence des métiers. Tout cela n'a de but que de nous détourner de l'emmerdement du quotidien, avec pour seul soutient, la pensée.
- Penser… C'est ce que je cherche à atteindre depuis toujours !
- Tu ne l'atteins pas, tu l'as en toi, je te l'ai déjà dit, la seule chose que tu peux faire, c'est le découvrir !
- Tu penses si bien, serais-tu un… un Djiou ?

Il soulève sa manche et je vois la marque ! La marque du Djiou, imprimée à coup de fer brûlant sur la peau !

- Je suis effectivement un Djiou, et je peux t'assurer une chose, bonhomme…
- Quoi donc ?
- Tu en es un toi aussi ! Mais tu es différent, car tu es passé outre les yeux de la Caste, et tu seras sûrement celui qui sauvera NeoUtopia !
- M… moi ? Un Djiou ?
- Et pas des moindres, personne avant toi n'avait osé quitter les cours. Avec toi, j'en suis certain, viendra le début du règne de la pensée ! Une Renaissance pour NeoUtopia !
Je viens de recevoir le deuxième choc de ma journée, moi qui ai toujours recherché la vérité de la pensée, j'apprends qu'elle est encrée en moi plus qu'en quiconque ! Il me faut quelques minutes pour enfin parvenir à retrouver l'usage de la parole.
- Je… Je viens de me rendre compte que je ne t'ai pas donné de nom ! que j'ai enfin réussi à dire.
- Tu nous donnes des noms ? Autres que nos matricules ? C'est une bonne idée ça ! Quel sera le mien ?
- Anthony, ça te vas ?
- Très bien, moi je t'appellerai Hannibal !
- Je préfère les noms en A !
- Oui, mais j'aime beaucoup Hannibal ! En plus ça sonne bien, nous sommes plutôt liés, il faut que nos noms concordent ! Anthony et Hannibal, ça sort tout seul, tu ne trouves pas ? qu'il me dit avec le sourire.
- D'accord, je te laisse choisir ! Au revoir, Anthony…
- Adieux, Hannibal…

Je vois Anthony passer cette grande porte vers sa Mort, vers le but de sa vie… Je ne sais plus comment réagir, j'en ai plus appris en 5 minutes qu'en plusieurs année d'éducation inutile ! Je suis un Djiou, celui qui est passé outre les tests, celui que l'on ne soupçonne pas ! Je fais partie des NeoUtopiens non pensants, je dois les initier ! C'est mon devoir, mon cadeau envers la Cité ! NeoUtopia, tu nous dis briller de tous tes feux, mais moi je peux te faire resplendir ! Plus besoin d'aller voir les femmes, je dois directement aller vers la population.


J'ai couru pour arriver au centre de la Cité, mais j'y suis maintenant. Il y a du monde partout, qui se déplace en rangs, en files indiennes, ordonnées. Il y a un gros cube blanc au milieu de la place. Je cours monter dessus pour crier ma joie de penser, parler et tenter de convaincre ! Quand je crie, ils tournent la tête, quand j'hurle, ils s'arrêtent…

- NeoUtopiens, écoutez-moi ! que j'ai crié le plus fort possible. Cessez de vivre programmés comme des robots non pensant ! Cessez de croire ce que l'on vous a enseigné ! NeoUtopia telle que vous la voyez n'est que le rêve de neuf personnes qui se croient au-dessus de la pensée humaine ! Cessez de vous déplacer les uns dernière les autres ! Suivez vos propres chemins, commencez par déformer vos lignes droites à votre guise, c'est le début de la réflexion ! Vous éprouvez tous des sentiments envers telle ou telle personne, et avoir des sentiments prouve que vous avez quelque part en vous la force nécessaire pour penser par vous-mêmes ! Pour l'instant vous vivez dans un rêve qui ressemble plus à un cauchemar, mais en y mettant du vôtre, vous vivrez non pas dans un rêve, mais dans votre rêve ! Non, vous n'êtes pas conditionnés, vous êtes humains ! Je le vois dans vos regards étincelants ! Sachez une chose, l'Ennemi n'existe pas, il n'y a aucun danger dehors, nous devrions avoir le droit de voir hors de la ville ! De découvrir le monde de dehors ! Tout cela ne dépend que de vous, tout cela ne dépend que de votre capacité à penser ! NeoUtopien, vous devez…

Ma parole est coupée. Coupée… Je viens de me prendre une balle en pleine tête. J'avais oublié les snipers postés au sommet du château des Neuf qui surplombe le centre de la Cité. Mais peu importe, il n'y à qu'une chose qui compte pour moi, d'avoir accompli ma mission. Je l'ai vu dans leurs yeux, l'émotion, début de la rébellion de la pensée. Je l'ai vu dans leurs mouvements, le coup de feu les a fait sursauter et sortir de leurs rangs. Je les vois repartir, chacun de leurs coté, plus de ligne droite ! J'ai réussi dans la mission de ce jour ! J'ai amorcé la libération de NeoUtopia… Ils pensent par eux même. C'est sûr, la véritable guerre commence avec ma Mort, le but de ma Vie, et les NeoUtopiens vont souffrir de l'apprentissage de la pensée. Mais une fois commencé, on ne peut plus oublier ce que l'on a appris de la pensée !


Par ma Mort, mon exécution en publique, débute la Mort lente des Neuf et le renversement de la Cité. Désormais, NeoUtopia souffre avec un véritable but, NeoUtopia souffre en pensant. NeoUtopia souffre avec un seul but : Vivre !

3 derniers commentaires sur l'article


Ginari [ le 10-08 à 01:53 ]
Magnifique, c'est très beau. Ca m'a parfois fait penser aux fourmis de B.Werber.
CoOKeR [ le 13-07 à 00:06 ]
Très beaux texte :P
BlooDy_DudE [ le 13-06 à 19:10 ]
0uned> héhé, t'inquiete, j'en ferai d'autres pour dénoncer d'autres aspects qui ne me plaisent pas un jour ^^ Mais je fais beaucoup d'autres textes, j'en posterai d'ici peu :)
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